Mercredi 24 octobre.
Contrat rempli et grimpée du géant de Provence faite, nous avons décidé au soir de cette mémorable sortie de mettre à profit ce jour nouveau pour une balade jolie complémentaire.
Dans tous les groupes humains il faut un leader. Callune s’impose naturellement pour quelques raisons que j’énonce dans le désordre : Elle est la seule femme ce qui lui donne une priorité admise, elle connaît bien la région et enfin elle dispose de l’indispensable carte qu’elle consultera à plusieurs reprises dans le but d’éviter les routes encombrées de voitures. Lolo est allergique à la circulation automobile qui empoisonne ses sorties belfortaines.
Phiphi et moi suivrons, dociles et disciplinés.
Ce matin sera strictement semblable à celui de la veille : même horaire, même cérémonial, même petit déjeuner, comme si nous avions déjà des habitudes !
En me levant, j’ai jeté un oeil inquiet au feuillage du platane planté sur la place, sous notre fenêtre : Il est agité comme un diable en paradis. La météo a été formelle pour nous annoncer un mistral gagnant à 60/80 km/h en rafales. Et le bougre semble bien là.
J’ai horreur du grand vent.
Et si j’avais été seul, je crois que j’aurai renoncé à toute sortie !
Mais Callune est déjà sur la place prête pour le départ …
Nous avons décidé de pique niquer ce qui implique des achats à Malaucène. Nous traversons le marché de la ville et bientôt les sacs de Lolo, Phiphi et Callune sont garnis de provisions. Privilégié par mon grand âge, je suis dispensé de charge. Dès que je veux prendre le moindre fromage, pain ou pomme, ça m’est arraché des mains pour aller au fond du sac d’un pote.
Ce matin, je me sens d’humeur monarchique : J’ai troqué mon casque pour une couronne et mon guidon pour un sceptre !
Et nous voilà partis sur les petites routes provençales ensoleillées, si pleines de senteurs nouvelles pour nous. Le ciel est si bleu et il est si réconfortant d’être intégré à un groupe amical et chaleureux que j’en ai la pédale légère.
Le parcours élaboré par Callune est génial car nous empruntons une vallée, celle du Toulourenc je crois, qui est complètement abritée du vent par un long épaulement de collines sur notre gauche. A droite, le Ventoux tutélaire sous surveille. Je l’observe avec la crainte que dans un désir de vengeance (nous l’avons vaincu hier) il nous jette un mauvais sort !
Il n’en sera rien.
Dans un village un brave homme a dressé un étal appétissant de fruits et légumes. Sympathique le brave homme offre à Callune (et à elle seule) un bout de grappe de raisin ; c’est bien là le privilège aussi d’être une femme. En retour nous lui achetons une barquette de jolies tomates … Au pique nique il s’avèrera que ces fruits sont aussi beaux qu’insipides.
Midi approche. Nous avisons un joli village, au bord du Toulourenc, qui nous servira de cadre pour notre pique nique. Un indigène nous indique même une table au milieu d’un pré.
La table était bancale ! Mais quel bon repas nous avons fait, en prenant bien notre temps … Salutaire moment de détente.
Cependant, il nous faut nous remettre en selle.
Nous passons de l’autre côté des collines que nous avons côtoyées. Certes, il y a un petit mistral latéral mais pas gênant du tout. Callune a tout prévu car nous avons à présent une route plutôt descendante. Et je me surprends, dans la roue secourable de Lolo, à pousser un inhabituel 53X14 avec une facilité qui me surprend. Il y a longtemps que je n’ai eu ce pédalage facile des jours où l’on se dit dans un langage cycliste « j’ai de bonnes jambes » !
Et nous touchons à la fin de notre balade jolie. Un crochet à Vaison la Romaine me rappelle de bons souvenirs. En arrêt sur le petit pont qui enjambe l’Ouvèze, nous voyons serpenter un minuscule ruisseau à plus cinquante mètres en contrebas ; est noté le niveau atteint par ce torrent dévastateur lors de sa crue centennale de 1992. Inimaginable …
Une bonne mousse prise sur la place de la ville où trônent d’admirables platanes nous relance vers Malaucène.
En soirée, Lolo se met en cuisine : Des saucisses de son coin ; je prépare des pâtes alsaciennes pour accompagner. Le tout arrosé de vin d’Alsace et du Jura que Lolo nous offre. Et Callune et Pimpon ont apporté un énorme Saint Nectaire !
Certes, ce soir là, nous avons quelque peu oublié la saine diététique ce que mon estomac se chargera de me rappeler.
Vient le moment des au revoir !
Au revoir ? Ca veut dire que nous nous reverrons.
Le village du pique nique
Les convives à table
Le pont sur l'Ouvrez à Vaison la Romaine
