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le sommeil et les rêves
Posté : 20 avr. 2024, 10:36
par Robert
La qualité du sommeil conditionne, chacun le sait, la qualité de la journée qui suit.
Or, depuis ma chute, je fais appel, pour trouver le sommeil à un substitut chimique, appelé communément « somnifère ».
Le somnifère me permet un sommeil de bonne qualité de 11h30 à 4h du matin. Reste la tranche qui va de 4h du matin, aux moments qui suivent… C’est là que ma tête, ma pauvre tête résonne : des cloches, tout à coup, y sautent avec furie ! C’est le temps où je suis plongé dans un monde fictif. Ce matin , même Kafka ne l’aurait pas imaginé.
Il est quatre heures. Sarrebourg ne s’éveille pas encore, pas un bruit, pas un son, toute vie est éteinte. Que la nuit est noire !
J’évolue dans un monde purement imaginaire.
Je suis dans un désert immensément ocre. Un vent permanent soulève le sable d"où affleurent des rochers roses et ocres.
Dans ce désert ne peuvent croître que des cactus : d’abord, je vois une plante grise, couverte de poussière et de piquants et qui donne un fruit en forme de drupe, une sorte de cerise.
Un être qui ressemble à un homme évolue dans ce buisson ardent d’épines. Il recherche des fruits pour s’alimenter. il voudrait les saisir mais les épines l’en empêche.
Un peu plus loin dans les branches d’un autre buisson se cache un autre être dont je ne suis pas certain qu’il soit de la même espèce que le précédent. D’ailleurs, ces êtres sont asexués. Je ne vois dans ce monde aucun enfant qui perpétuerait cette espèce. Ce second être est à la recherche d’un autre fruit, complètement gris- vert et qui est comestible.
Les humanoïdes de mon cauchemar ne semblent pas se connaître. Ils vivent séparément ou plutôt il survivent dans cet univers étrange et hostile qui les sépare.
Je suis intégré à ce monde. Je voudrais aider mes congénères mais je ne puis approcher du buisson épineux. Je tente d’en écarter les branches, en vain. je voudrais goûter les fruits rouges que mon semblable voudrait s’attribuer. Ils ressemblent tant aux cerises rouges de mon cerisier aujourd’hui en fleurs dans le jeune avril. Je me pique les doigts et je saigne.
Mais soudain l’Aurore émerge. Une lumière grise passe à travers les carreaux de ma fenêtre aux volets soulevés. J’aperçois nimbée de brume la silhouette de la maison de nos voisins. Les paysages lentement se définissent.
Ma tête qui résonnait soudain, raisonne et élimine le déraisonnable. Je suis bien là, dans mon lit, tout redevient clair. Mon univers familier se dessine et s’envolent mes chimères comme un essaim d’éphémères.
Ce sera une journée ordinaire pour l’invalide que je suis devenu.
………………..
Et je mesure soudain la chance que j’ai de trouver un sommeil régulièrement ; je pense aux insomniaques dans l’attente du repos salutaire dans des longues nuits peuplées de cauchemars. leurs yeux s’ouvrent sur un univers uniformément noir. Ils attendent que se lève un jour incertain.
Re: le sommeil et les rêves
Posté : 20 avr. 2024, 13:00
par callune
Drôle de rêve

incroyable !
perso je fais essentiellement des cauchemars...de l'école
Bonne journée Robert

Re: le sommeil et les rêves
Posté : 20 avr. 2024, 16:27
par phiphi76
Je ne sais que dire ! Depuis un an, tout ça me fait mal mon pote ! Mais surtout, continue d'écrire tes merveilleux textes que je me délecte de lire ! Tu nous avais fait part de ton intention de ne plus écrire, ne fait pas ça, je t'en conjure, c'est trop bien, je m'enrichie chaque fois un peu plus, merci pour tout mon ami
@ cyberpotes + !
Re: le sommeil et les rêves
Posté : 22 avr. 2024, 22:44
par callune
phiphi76 a écrit : ↑20 avr. 2024, 16:27
Je ne sais que dire ! Depuis un an, tout ça me fait mal mon pote ! Mais surtout, continue d'écrire tes merveilleux textes que je me délecte de lire ! Tu nous avais fait part de ton intention de ne plus écrire, ne fait pas ça, je t'en conjure, c'est trop bien, je m'enrichie chaque fois un peu plus, merci pour tout mon ami
@ cyberpotes + !
C'est sûr: Robert est notre meilleur auteur et philosophe aussi

Re: le sommeil et les rêves
Posté : 01 mai 2024, 14:11
par Robert
Rêve prémonitoire.
je rêve tous les jours. Ce phénomène nouveau dans mon existence s’explique facilement par les substances que je suis contraint de m’administrer pour dormir.
Je ne raconte pas tous mes rêves, je suis contraint d’être sélectif.
Je raconte donc celui-ci parce qu’il m’a, semble-t-il, avoir une portée réaliste quant à la vie en société.
J’en reviens donc au récit de mon rêve.
Je suis un touriste dans le village où j’ai exercé ma profession d’instituteur pendant plus de 25 ans. C’était un village ordinaire, avec son église, sa mairie, ses maisons alignées à l’ancienne, son site merveilleux au-dessus de la vallée de la Moselle. La rivière martyrisée par de grands travaux de canalisation y coule éternelle et indifférente.
Aujourd’hui, mon village a pris un aspect particulier : les touristes y sont nombreux car on donne ici un concert renommé et qui a fait l’objet de publications dans la presse locale et régionale.
Je suis surpris de ne rencontrer aucun de mes anciens concitoyens. Parfois je crois reconnaître une famille, mais hélas, les enfants que j’ai connus sur les bancs de l’école sont des adultes, tout près de la retraite et mes parents d’élèves ne sont plus que des vieillards pliés par les ans. Personne ne me reconnaît, et je m’avise soudain que moi aussi, le temps ayant passé, je suis devenu comme eux, un vieillard méconnaissable.
Je m’arrête un instant devant l’église. Son aspect extérieur a bien changé. Si je reconnais facilement le clocher de style roman, une de ses façades est consacrée désormais à l’image sculptée d’un lion gigantesque ; cette image tutélaire est en pierres jaunes de Jaumont ; ce matériau, tout neuf, rayonne au soleil.
Le village tout entier est consacré à la puissance de l’animal féroce, guerrier, symbole militaire de la force et de l’invincibilité.
Mes déplacements m’amènent à pousser mon fauteuil roulant dans l’église. Quels changements ! Désormais, tout ce qui était petit, y est immense et rectiligne. C’est le règne de l’angle droit … Cette architecture m’écrase avec ses piliers dressės,ronds et lisses, sans chapiteaux et je m’empresse de sortir à l’air libre. je suis allergique à l’odeur de l’encens ; je continue mon errance. Je me dirige vers la salle de concert.
Personne ne s’intéresse à moi, et je ne reconnais personne.
L’architecture de la salle de concert est strictement semblable à celle de l’église, linéaire, sans ornements, militaire et écrasante dans son immensité. Une foule déjà s’y presse.
Je cherche à intégrer un groupe afin de m’asseoir pour le concert. C’est alors que je me rends compte du fait que je ne suis pas du tout comme les autres. Tout le monde marche, alors que je suis sur un fauteuil roulant. Je suis incapable de tenir dans mes mains le programme du concert qui a été distribué à l’entrée de la salle. Je cherche en vain une main secourable. Je voudrais bien m’asseoir, mais il ne reste plus un siège disponible. Sur les bancs, les futurs auditeurs installés ont posé des vêtements pour réserver des places à des gens par eux connus, parents ou amis.
Désormais, comme je suis seul, et comme je ne suis pas comme tout le monde, à présent on m’observe. Et moi de chercher un endroit où je pourrais m’asseoir et me cacher.
Je vois quelques personnes comme moi, solitaires et exclues, qui ont trouvé un siège de fortune. Elles le déplient et s’installent discrètement pour se cacher à l’abri d’un pilier.
Et je reste là, debout, ne sachant que faire, alors que, là-bas, tout au bout de la salle, les musiciens accordent leurs instruments dans une aimable cacophonie.
Je me réveille à ce moment de mon rêve. Mon errance physique s’achève et commence la réflexion.
Grande est là difficulté de vivre pour les êtres qui sont ou qui se sentent différents de la société des hommes à laquelle ils devraient s’intégrer.
Je viens de prendre place dans le monde des exclus. Celui des gens assis. L’autre monde est celui des gens debout.
………………
Je viens de prendre place avec mes jambes et mes bras paralysés dans ce monde des debout. Je suis au bord du jardin dans dans un fauteuil. J’observe mon gendre et Lolo venus me donner un coup de main et mes filles essayer de se conformer à mes instructions. J’explique avec des mots et des gestes comment planter des pommes de terre.
Il faut d’abord trouver les outils dans la cabane de jardin que je ne vois pas et ce n’est pas une mince affaire. L’outil convenable trouvé, il reste alors à expliquer le mode de culture que je souhaiterais. Avec l’usage que l’on peut faire des outils tels les piquets, cordeaux, pioches, râteaux, racloir … m …
Revoilà le dialogue de sourds. je fais des gestes d’incompris.
En fin de compte me vient la tentation d’abandon : vous faites des trous où vous pouvez et vous fichez les patates de semences dedans. Et n’en parlons plus.
Le monde des debout ne sait pas à quel point le monde n’est pas un long jardin potager tranquille pour ceux qui restent assis.
Re: le sommeil et les rêves
Posté : 02 mai 2024, 21:44
par callune
Tu fais des rêves incroyables Robert qui amènent à un débat philosophique sur notre société et la place de chacun dans celle-ci
Tu t'y sens exclu et c'est compréhensible. L'exclusion va si vite dès que l'on sort quelque peu de la norme (perso, cela fait longtemps que je m'en sens exclue avec mes problèmes professionnels...)
Je ne peux imaginer ce que serait ma vie si j'étais privée comme toi des mes bras et jambes ... ce que tu vis Robert ... personne ne peut l'imaginer
Nous pouvons qu'admirer ton courage pour exister et te battre encore et encore
Ce que tu écris est rare et précieux alors merci d'être là pour nous et de nous aider penser et à réfléchir
Merci Robert
Re: le sommeil et les rêves
Posté : 04 mai 2024, 10:10
par Robert
callune a écrit : ↑02 mai 2024, 21:44
Tu fais des rêves incroyables Robert qui amènent à un débat philosophique sur notre société et la place de chacun dans celle-ci
Tu t'y sens exclu et c'est compréhensible. L'exclusion va si vite dès que l'on sort quelque peu de la norme (perso, cela fait longtemps que je m'en sens exclue avec mes problèmes professionnels...)
Je ne peux imaginer ce que serait ma vie si j'étais privée comme toi des mes bras et jambes ... ce que tu vis Robert ... personne ne peut l'imaginer
Nous pouvons qu'admirer ton courage pour exister et te battre encore et encore
Ce que tu écris est rare et précieux alors merci d'être là pour nous et de nous aider penser et à réfléchir
Merci Robert
Je te remercie infiniment Callune de te donner le mal de lire mes élucubrations. Certes, mon état actuel n’est guère enviable, mais il est le meilleur possible : je suis bien entouré et je suis à la maison. Je lis, j’écris, je regarde la télévision, et je garde même l’espoir de promenades en voiture.
Re: le sommeil et les rêves
Posté : 04 mai 2024, 20:38
par callune
Re: le sommeil et les rêves
Posté : 05 mai 2024, 09:51
par Lolo90
Robert a écrit : ↑04 mai 2024, 10:10
callune a écrit : ↑02 mai 2024, 21:44
Tu fais des rêves incroyables Robert qui amènent à un débat philosophique sur notre société et la place de chacun dans celle-ci
Tu t'y sens exclu et c'est compréhensible. L'exclusion va si vite dès que l'on sort quelque peu de la norme (perso, cela fait longtemps que je m'en sens exclue avec mes problèmes professionnels...)
Je ne peux imaginer ce que serait ma vie si j'étais privée comme toi des mes bras et jambes ... ce que tu vis Robert ... personne ne peut l'imaginer
Nous pouvons qu'admirer ton courage pour exister et te battre encore et encore
Ce que tu écris est rare et précieux alors merci d'être là pour nous et de nous aider penser et à réfléchir
Merci Robert
Je te remercie infiniment Callune de te donner le mal de lire mes élucubrations. Certes, mon état actuel n’est guère enviable, mais il est le meilleur possible : je suis bien entouré et je suis à la maison. Je lis, j’écris, je regarde la télévision, et
je garde même l’espoir de promenades en voiture.
Et avec ton chapeau de paille sur la tête et tes lunettes Oakley sur le nez ça va donner je te le dis

Re: le sommeil et les rêves
Posté : 05 mai 2024, 22:20
par callune
Lolo90 a écrit : ↑05 mai 2024, 09:51
Robert a écrit : ↑04 mai 2024, 10:10
callune a écrit : ↑02 mai 2024, 21:44
Tu fais des rêves incroyables Robert qui amènent à un débat philosophique sur notre société et la place de chacun dans celle-ci
Tu t'y sens exclu et c'est compréhensible. L'exclusion va si vite dès que l'on sort quelque peu de la norme (perso, cela fait longtemps que je m'en sens exclue avec mes problèmes professionnels...)
Je ne peux imaginer ce que serait ma vie si j'étais privée comme toi des mes bras et jambes ... ce que tu vis Robert ... personne ne peut l'imaginer
Nous pouvons qu'admirer ton courage pour exister et te battre encore et encore
Ce que tu écris est rare et précieux alors merci d'être là pour nous et de nous aider penser et à réfléchir
Merci Robert
Je te remercie infiniment Callune de te donner le mal de lire mes élucubrations. Certes, mon état actuel n’est guère enviable, mais il est le meilleur possible : je suis bien entouré et je suis à la maison. Je lis, j’écris, je regarde la télévision, et
je garde même l’espoir de promenades en voiture.
Et avec ton chapeau de paille sur la tête et tes lunettes Oakley sur le nez ça va donner je te le dis
c'est sûr !
