Portraits du passé ... histoires de ma vieille France.
- Robert
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Portraits du passé ... histoires de ma vieille France.
La mémoire est ainsi faite que soudain elle vous ramène au passé et, passé un temps certain, le passé devient de l'histoire.
De l'histoire récente certes ; mais ce qui s'est passé hier est déjà entré au chapitre de l'histoire !
Aujourd'hui, et je ne saurais en expliquer la raison, me revient en mémoire le souvenir de tante Octavie.
Je la revois bien vivante, sur son banc de la rue de la poste, à Cuisery (Saône et Loire) où je passais mes vacances estivales ; c'était dans les années cinquante (1950 ...) années ou le pays relevé de ses cendres renaissait, après les temps si difficiles de la seconde guerre mondiale.
Tante Octavie était la soeur de mon grand père. Elle était donc ma grand-tante.
Du haut de mes dix ans, je la voyais très vieille ; et je me souviens des bises mouillées de cette vieille dame. En effet, les rides du coin de ses lèvres laissait à mes joues une trace humide que j'essuyais furtivement du revers de la main. Cet âge est sans pitié, j'essayais toujours d'éviter les embrassades de ma tante Octavie !
Elle avait été très belle, tante Octavie, en un temps que je n'avais pas connu, dans les années 1900, époque qualifiée de belle par nos historiens : Je la voyais sur la photo qui trônait sur le guéridon de son salon, corsetée, en robe longue à crinoline, chignon haut, quand elle tenait avec son mari l'unique hôtel de la localité.
A dix ans, on n'imagine pas qu'une vieille dame ait pu être jeune, et belle, et désirable ...
Tante Octavie passait les belles heures de l'été sur son banc, devant sa porte. Elle regardait passer les gens. C'était sa télévision car en ce temps là, il n'en existait pas d'autre. Et par cette source d'informations, elle savait tout et nul ne pouvait vaquer sans échapper à son regard inquisiteur.
Et ma grand tante avait gardé de son métier d'hôtesse un souci méticuleux de sa personne. De sa maison aussi.
Tout y brillait d'une propreté méticuleuse.
Et chez elle, ça sentait bon la cire d'abeille et la pomme, tout y brillait et rutilait.
Ces sensations olfactives et visuelles sont restées si présentes que ma mémoire, aujourd'hui encore, les magnifie.
Souvent accompagnée sur son banc d'une dame de sa génération répondant au patronyme mémorable de Madame Soulier, j'entends encore tante Octavie s'interroger sur l'avenir du gamin que j'étais : "Mais que vont-ils devenir, ces jeunes" ... ?
Eh bien, tu vois, tante Octavie, ils sont devenus ce que tu étais alors : Des vieux !
De l'histoire récente certes ; mais ce qui s'est passé hier est déjà entré au chapitre de l'histoire !
Aujourd'hui, et je ne saurais en expliquer la raison, me revient en mémoire le souvenir de tante Octavie.
Je la revois bien vivante, sur son banc de la rue de la poste, à Cuisery (Saône et Loire) où je passais mes vacances estivales ; c'était dans les années cinquante (1950 ...) années ou le pays relevé de ses cendres renaissait, après les temps si difficiles de la seconde guerre mondiale.
Tante Octavie était la soeur de mon grand père. Elle était donc ma grand-tante.
Du haut de mes dix ans, je la voyais très vieille ; et je me souviens des bises mouillées de cette vieille dame. En effet, les rides du coin de ses lèvres laissait à mes joues une trace humide que j'essuyais furtivement du revers de la main. Cet âge est sans pitié, j'essayais toujours d'éviter les embrassades de ma tante Octavie !
Elle avait été très belle, tante Octavie, en un temps que je n'avais pas connu, dans les années 1900, époque qualifiée de belle par nos historiens : Je la voyais sur la photo qui trônait sur le guéridon de son salon, corsetée, en robe longue à crinoline, chignon haut, quand elle tenait avec son mari l'unique hôtel de la localité.
A dix ans, on n'imagine pas qu'une vieille dame ait pu être jeune, et belle, et désirable ...
Tante Octavie passait les belles heures de l'été sur son banc, devant sa porte. Elle regardait passer les gens. C'était sa télévision car en ce temps là, il n'en existait pas d'autre. Et par cette source d'informations, elle savait tout et nul ne pouvait vaquer sans échapper à son regard inquisiteur.
Et ma grand tante avait gardé de son métier d'hôtesse un souci méticuleux de sa personne. De sa maison aussi.
Tout y brillait d'une propreté méticuleuse.
Et chez elle, ça sentait bon la cire d'abeille et la pomme, tout y brillait et rutilait.
Ces sensations olfactives et visuelles sont restées si présentes que ma mémoire, aujourd'hui encore, les magnifie.
Souvent accompagnée sur son banc d'une dame de sa génération répondant au patronyme mémorable de Madame Soulier, j'entends encore tante Octavie s'interroger sur l'avenir du gamin que j'étais : "Mais que vont-ils devenir, ces jeunes" ... ?
Eh bien, tu vois, tante Octavie, ils sont devenus ce que tu étais alors : Des vieux !
- Lolo90
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Re: Portraits du passé ... histoires de ma vieille France.
Belle prose Robert, on dirait le début d'un bon roman
Tu devrais essayer d'en écrire un d'ailleurs
Et dis toi aussi que ta tante était assez connue chez Skoda, ils en ont fait une bagnole

Tu devrais essayer d'en écrire un d'ailleurs
Et dis toi aussi que ta tante était assez connue chez Skoda, ils en ont fait une bagnole

- Robert
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Re: Portraits du passé ... histoires de ma vieille France.
Merci Lolo pour ta flatteuse appréciation.
Ecrire est un art, comme la musique ou la peinture. Chacun a sa muse !
Certes j'écris avec une certaine facilité, mais de là à passer à la postérité !
Je reste à l'échelon local et n'écris que de petits textes. Je le fais avec plaisir et sans contrainte.
J'avais commencé au moment de ma retraite un long récit mi autobiographique, mi romancé. Arrivé à 150 pages environ, un aléa informatique non résolu à l'époque par SFR a tout envoyé dans le monde du virtuel. Ce qui m'a définitivement découragé d'écrire autre chose que de brèves anecdotes.
SI ... SI ... Si j'avais fait des études littéraires, si je m'étais destiné au journalisme par exemple, il en aurait été peut-être autrement. Mais c'est une vérité qu'en chacun de nous sommeille un talent qui restera endormi dans le virtuel.
Ecrire est un art, comme la musique ou la peinture. Chacun a sa muse !
Certes j'écris avec une certaine facilité, mais de là à passer à la postérité !

Je reste à l'échelon local et n'écris que de petits textes. Je le fais avec plaisir et sans contrainte.
J'avais commencé au moment de ma retraite un long récit mi autobiographique, mi romancé. Arrivé à 150 pages environ, un aléa informatique non résolu à l'époque par SFR a tout envoyé dans le monde du virtuel. Ce qui m'a définitivement découragé d'écrire autre chose que de brèves anecdotes.
SI ... SI ... Si j'avais fait des études littéraires, si je m'étais destiné au journalisme par exemple, il en aurait été peut-être autrement. Mais c'est une vérité qu'en chacun de nous sommeille un talent qui restera endormi dans le virtuel.
- Robert
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Re: Portraits du passé ... histoires de ma vieille France.
Il y avait aussi la Rosalie de Citroën.

A l'époque, on donnait aux voitures des prénoms féminins ! Heureuse époque où les voitures étaient rares et les routes peu fréquentées.
Et je me souviens que sur le capot de la Rosalie de mon oncle figurait cette locution mystérieuse pour moi : MOTEUR FLOTTANT. Sans doute un fleuron du modernisme de l'époque.
Pour compléter par une anecdote automobile vécue, nous devions aller aux vendanges avec mon grand père paternel. Il nous fallait monter sur le promontoire rocheux du village appelé "La Roche Vineuse". Dans la rampe finale, il nous avait fallu descendre de la voiture, ne laissant que son chauffeur au volant, pour pousser la Rosalie jusqu'à sa destination.

- callune
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- Robert
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Re: Portraits du passé ... histoires de ma vieille France.
Hier, j'ai téléphoné à mon ami Robert.
Robert est entré à la fois dans le cercle restreint des nonagénaires et dans un établissement réservé aux personnes âgées dépendantes ... un avenir qui nous guette presque tous, hélas.
Robert est donc devenu un vieillard, sec comme un sarment d'une vieille vigne. Sec, il l'a toujours été, mais l'âge a accentué les effets de sa maigreur. Il ne sort plus guère de sa chambre, Robert, lui qui était taillé pour les grandes randonnées et les grands espaces.
Et il en a fait, des brevets cyclo-montagnards, aux quatre coins de l'hexagone, et des tours de départements, et des randonnées mémorables ...
Si Robert a perdu complètement sa mobilité du passé, il a gardé ce que l'on désigne par une périphrase : "Il a gardé toute sa tête" ...
Je m'arrête un instant sur cette réalité et je m'interroge aux fins de savoir si cet élément de vie que l'on ne choisit pas n'est pas, finalement une cruelle et permanente douleur : Se voir ainsi diminué, déclinant, à la charge des autres ... Ne vaut-il pas mieux être atteint de cette maladie neurologique qui ôte l'entendement et les souvenirs au fur et à mesure que passent les années.
Et nous évoquons avec Robert ces temps reculés où, sacs à dos et sacoches aux bécanes, nous avalions cols et centaines de kilomètres, insouciants du futur qui est aujourd'hui devenu le présent. Et je lui rappelle le temps où, toujours deux lacets plus haut, il nous hélait, Louis et moi, nous traitant très amicalement de fainéants !
Robert est entré à la fois dans le cercle restreint des nonagénaires et dans un établissement réservé aux personnes âgées dépendantes ... un avenir qui nous guette presque tous, hélas.
Robert est donc devenu un vieillard, sec comme un sarment d'une vieille vigne. Sec, il l'a toujours été, mais l'âge a accentué les effets de sa maigreur. Il ne sort plus guère de sa chambre, Robert, lui qui était taillé pour les grandes randonnées et les grands espaces.
Et il en a fait, des brevets cyclo-montagnards, aux quatre coins de l'hexagone, et des tours de départements, et des randonnées mémorables ...
Si Robert a perdu complètement sa mobilité du passé, il a gardé ce que l'on désigne par une périphrase : "Il a gardé toute sa tête" ...
Je m'arrête un instant sur cette réalité et je m'interroge aux fins de savoir si cet élément de vie que l'on ne choisit pas n'est pas, finalement une cruelle et permanente douleur : Se voir ainsi diminué, déclinant, à la charge des autres ... Ne vaut-il pas mieux être atteint de cette maladie neurologique qui ôte l'entendement et les souvenirs au fur et à mesure que passent les années.
Et nous évoquons avec Robert ces temps reculés où, sacs à dos et sacoches aux bécanes, nous avalions cols et centaines de kilomètres, insouciants du futur qui est aujourd'hui devenu le présent. Et je lui rappelle le temps où, toujours deux lacets plus haut, il nous hélait, Louis et moi, nous traitant très amicalement de fainéants !
- Lolo90
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Re: Portraits du passé ... histoires de ma vieille France.
Ouep, pas facile de choisir entre la peste et le choléra
Souhaitons que ton pote Robert puisse passer le reste de sa vie dans les meilleures conditions et qu'il puisse avoir tout de même des moments de joie et bonheur.
J'ai regardé il y a quelque temps un reportage d'une jeune femme qui, suite à un accident, était devenue paraplégique.
Après un moment d'abattement elle a finalement trouvé un sens à sa vie, est heureuse malgré son handicap et même qu'elle était au point de préféré sa vie d'aujourd'hui que celle d'avant
Sacrée leçon de courage, mais je me demande encore si c'est du courage ou de la persuasion afin de trouver un sens à sa vie

Souhaitons que ton pote Robert puisse passer le reste de sa vie dans les meilleures conditions et qu'il puisse avoir tout de même des moments de joie et bonheur.
J'ai regardé il y a quelque temps un reportage d'une jeune femme qui, suite à un accident, était devenue paraplégique.
Après un moment d'abattement elle a finalement trouvé un sens à sa vie, est heureuse malgré son handicap et même qu'elle était au point de préféré sa vie d'aujourd'hui que celle d'avant

Sacrée leçon de courage, mais je me demande encore si c'est du courage ou de la persuasion afin de trouver un sens à sa vie

- Robert
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Re: Portraits du passé ... histoires de ma vieille France.
Je pense que jeune, au prix d'un grand courage, et nous en avons des exemples, la personne atteinte d'un handicap peut le surmonter. Hélas, la vieillesse ne laisse pas beaucoup d'espoir.Lolo90 a écrit : ↑31 déc. 2020, 09:05 Ouep, pas facile de choisir entre la peste et le choléra![]()
Souhaitons que ton pote Robert puisse passer le reste de sa vie dans les meilleures conditions et qu'il puisse avoir tout de même des moments de joie et bonheur.
J'ai regardé il y a quelque temps un reportage d'une jeune femme qui, suite à un accident, était devenue paraplégique.
Après un moment d'abattement elle a finalement trouvé un sens à sa vie, est heureuse malgré son handicap et même qu'elle était au point de préféré sa vie d'aujourd'hui que celle d'avant![]()
Sacrée leçon de courage, mais je me demande encore si c'est du courage ou de la persuasion afin de trouver un sens à sa vie![]()
Mon pote est condamné a terminer sa vie en EHPAD, avec quelques visites familiales et amicales ...
- callune
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Re: Portraits du passé ... histoires de ma vieille France.
c'est superbe de pouvoir raconter vos souvenirs ! Quand on raconte, on revit chaque instant et c'est bonRobert a écrit : ↑31 déc. 2020, 07:52 Hier, j'ai téléphoné à mon ami Robert.
Robert est entré à la fois dans le cercle restreint des nonagénaires et dans un établissement réservé aux personnes âgées dépendantes ... un avenir qui nous guette presque tous, hélas.
Robert est donc devenu un vieillard, sec comme un sarment d'une vieille vigne. Sec, il l'a toujours été, mais l'âge a accentué les effets de sa maigreur. Il ne sort plus guère de sa chambre, Robert, lui qui était taillé pour les grandes randonnées et les grands espaces.
Et il en a fait, des brevets cyclo-montagnards, aux quatre coins de l'hexagone, et des tours de départements, et des randonnées mémorables ...
Si Robert a perdu complètement sa mobilité du passé, il a gardé ce que l'on désigne par une périphrase : "Il a gardé toute sa tête" ...
Je m'arrête un instant sur cette réalité et je m'interroge aux fins de savoir si cet élément de vie que l'on ne choisit pas n'est pas, finalement une cruelle et permanente douleur : Se voir ainsi diminué, déclinant, à la charge des autres ... Ne vaut-il pas mieux être atteint de cette maladie neurologique qui ôte l'entendement et les souvenirs au fur et à mesure que passent les années.
Et nous évoquons avec Robert ces temps reculés où, sacs à dos et sacoches aux bécanes, nous avalions cols et centaines de kilomètres, insouciants du futur qui est aujourd'hui devenu le présent. Et je lui rappelle le temps où, toujours deux lacets plus haut, il nous hélait, Louis et moi, nous traitant très amicalement de fainéants !

- Robert
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Re: Portraits du passé ... histoires de ma vieille France.
Tu as raison, Callune, il y a un temps pour tout : celui où l'on se projette dans l'avenir, ou l'on est persuadé qu'il sera meilleur ... et celui où mieux vaut oublier que demain est proche.callune a écrit : ↑02 janv. 2021, 21:26c'est superbe de pouvoir raconter vos souvenirs ! Quand on raconte, on revit chaque instant et c'est bonRobert a écrit : ↑31 déc. 2020, 07:52 Hier, j'ai téléphoné à mon ami Robert.
Robert est entré à la fois dans le cercle restreint des nonagénaires et dans un établissement réservé aux personnes âgées dépendantes ... un avenir qui nous guette presque tous, hélas.
Robert est donc devenu un vieillard, sec comme un sarment d'une vieille vigne. Sec, il l'a toujours été, mais l'âge a accentué les effets de sa maigreur. Il ne sort plus guère de sa chambre, Robert, lui qui était taillé pour les grandes randonnées et les grands espaces.
Et il en a fait, des brevets cyclo-montagnards, aux quatre coins de l'hexagone, et des tours de départements, et des randonnées mémorables ...
Si Robert a perdu complètement sa mobilité du passé, il a gardé ce que l'on désigne par une périphrase : "Il a gardé toute sa tête" ...
Je m'arrête un instant sur cette réalité et je m'interroge aux fins de savoir si cet élément de vie que l'on ne choisit pas n'est pas, finalement une cruelle et permanente douleur : Se voir ainsi diminué, déclinant, à la charge des autres ... Ne vaut-il pas mieux être atteint de cette maladie neurologique qui ôte l'entendement et les souvenirs au fur et à mesure que passent les années.
Et nous évoquons avec Robert ces temps reculés où, sacs à dos et sacoches aux bécanes, nous avalions cols et centaines de kilomètres, insouciants du futur qui est aujourd'hui devenu le présent. Et je lui rappelle le temps où, toujours deux lacets plus haut, il nous hélait, Louis et moi, nous traitant très amicalement de fainéants !Il ne faut pas penser plus loin...
Se dire que jamais plus on ne sera aussi jeune qu'aujourd'hui et en profiter au mieux, sans penser aux lendemains.